Predator Badlands- Critique ! Des bases solides mais finalement...
- Thibault Jeanroy

- 26 nov.
- 5 min de lecture

Article rédigé par Albert Sammartin
Predator : BadLands est un film réalisé par Dan Trachtenberg, déjà en charge de Prey en 2022 puis Predator : Killer of Killers en 2025, franchise qui compte désormais, avec ce nouveau long métrage, sept opus, chiffre qui, compte tenu des succès des nouveaux films, risque de varier d’ici peu.
Des bases solides
Comme évoqué plus haut, avant BadLands, le réalisateur américain Dan Trachtenberg (qui avait en 2016 sorti le très bon 10 Cloverfield Lane, huis clos angoissant et poisseux porté par John Goodman et suite directe du Cloverfield de J. J. Abrams) s’était déjà emparé de la franchise avec Prey, qui se présentait alors comme un retour au concept, certes simple mais efficace, du premier film, à savoir suivre un ou plusieurs protagonistes perdus en pleine jungle (urbaine, dans le cas du deuxième film) et devant faire face à un ennemi qu’ils ne comprennent pas et qui les massacre sans difficulté, mais qui, lors du dénouement final, fait arme égale avec le dernier personnage restant.
Et de fait, j’avais fortement apprécié Prey à sa sortie, que j’avais perçue comme un vent de fraîcheur au sein de la saga après les suites catastrophiques aux deux premiers, tant d’un point de vue de l’écriture que de la mise en scène, plaçant mes attentes concernant le film de Trachtenberg assez basses.

Mais les variations apportées au concept décrit plus haut, c’est-à-dire transposer l’intrigue au XVIIIᵉ siècle au sein d’une tribu comanche dépourvue d’armes à feu et autres outils du XXᵉ, sans pour autant être révolutionnaires, fonctionnaient très bien et permettaient au film de varier ses enjeux, sa mise en scène et même ses décors, la jungle guatémalienne faisant place aux grandes plaines d’Amérique du Nord.
Concernant Killer of Killers également sorti cette année, mon constat positif reste globalement le même, le concept étant cette fois transposé en animation et sur trois époques différentes : l’ère viking scandinave de 841, le Japon féodal au XVIIᵉ siècle et la Seconde Guerre mondiale (ces changements d’époque étant le principal, voire le seul atout du film, mais étant plutôt divertissants à suivre).
Ces deux films m’ayant laissé l’impression d’une hausse de qualité bienvenue au sein de la franchise, c’est plutôt avec confiance que j’allais voir BadLands, que j’imaginais suivre ses aînés à la fois thématiquement mais aussi dans ses propositions esthétiques ou visuelles.
Un début prometteur
La première partie du long métrage m’a effectivement laissé un ressenti positif, avec pour commencer la promesse même du film : celle d’avoir pour protagoniste non plus un humain comme pour le reste de la saga, mais un Yautja (nom de l’espèce des Predators), créature à la moralité et aux croyances bien différentes des nôtres et qu’il serait intéressant de suivre en tant que personnage principal.
Le récit choisit de se focaliser ici sur Dek, jeune Yautja considéré par son clan comme faible et qui, après le sacrifice de son frère face à leur père, se retrouve propulsé sur Gemma, surnommée la « planète de la mort » du fait de sa faune et de sa flore belliqueuses, servant alors d’ultime épreuve à Dek pour tenter de regagner sa place au sein des siens.
Qu’il s’agisse de la scène d’introduction du film, qui s’ouvre sur un combat acharné et plutôt bien chorégraphié au sein d’une caverne opposant Dek à son frère — les deux utilisant des armes d’un rouge luminescent se reflétant sur leurs armures et créant des jeux de lumières au cœur de cet environnement obscur — ou encore la flore et la faune de la planète Gemma, allant de lianes semblables à des tentacules cherchant à dévorer le héros en passant par des chenilles kamikazes, ou encore un champ de fleurs blanches à première vue inoffensives mais se révélant aussi tranchantes que des lames de rasoir, la première heure m’a intrigué et m’a donné le sentiment que Trachtenberg s’amusait de ces trouvailles visuelles et de ces fameuses BadLands où aucun répit n’est laissé au Yautja.
De plus, l’apparition du personnage de l’androïde Thia, interprétée par l’excellente Elle Fanning (qui campe également celui de Tessa), apporte une dynamique intéressante au récit : puisque dépourvue de jambes suite à sa rencontre avec la créature la plus puissante de la planète mais par ailleurs source d’informations inépuisables du fait de sa condition d’androïde scientifique, Thia se retrouve attachée au dos de Dek, qui entend se servir d’elle comme d’un outil, mais qui va au fur et à mesure développer davantage d’empathie à son égard.
Le schéma classique des deux personnages à la personnalité radicalement opposée, l’un très loquace et avenant et l’autre fermé et muet, forcés de s’entraider face à l’adversité, marche étonnamment bien et nous donne davantage envie de suivre ces deux protagonistes, rendus immédiatement plus attachants.
Un dénouement paresseux
Mais si la première heure était parvenue à proposer des éléments quelque peu innovants et marquants au récit, la suite gâche selon moi totalement ce potentiel, enchaînant les scènes d’action pour le coup très clichées et sans beaucoup d’effort de mise en scène (le duel opposant Dek au Kalis), les décisions scénaristiques prévisibles — comme la présentation des androïdes de la Weyland-Yutani en véritables antagonistes du récit, étant déjà ceux de la saga Alien et présentés durant tout le long métrage comme dépourvus de conscience ou de compassion, les plaçant automatiquement dans une position d’ennemis antipathiques, effaçant toute complexité — ou encore l’affrontement final de Dek avec son père, présenté lui aussi comme un antagoniste foncièrement mauvais et donc un simple méchant que le héros doit terrasser.
Et c’est ici pour moi que réside le principal problème avec BadLands : celui de vouloir nous présenter un protagoniste d’une race différente de la nôtre, aux valeurs et objectifs différents (en cherchant à nous faire nous questionner quant à ce qui différencie notre espèce des autres, notamment justement sur la question de la moralité), mais qui se retrouve finalement à se comporter exactement tel qu’un être humain le ferait, en faisant preuve de compassion, de remords, voire d’amour, et ce presque dès le début du film avec son frère.
À aucun moment je n’ai finalement eu l’impression de suivre un Predator, présenté dès le départ par le récit comme trop sympathique et clairement établi comme un héros, là où le film aurait sans doute gagné à le dépeindre d’abord comme un être cruel et sanguinaire avant de le faire évoluer psychologiquement et donc nous le faire apprécier.
Ses interactions avec Thia, bien que touchantes et amusantes, reprennent des dynamiques classiques de duos comiques comme dit plus haut, à la manière de L’Arme fatale ou The Nice Guys, renforçant un sentiment d’assister à un simple buddy movie, mais de ce fait gâchant tout potentiel réellement dramatique voire de réflexion du long métrage.
Conclusion
Malgré ses deux précédentes productions auxquelles je reconnais de vraies qualités, et la promesse d’un récit différent et davantage audacieux au sein de la saga Predator, force est de constater que BadLands est pour moi une occasion manquée, celle justement d’innover un peu à l’ère de franchises de films interminables issues souvent du passé, tels Star Wars, tournant en rond et recyclant à l’infini les mêmes idées avariées.
Bien que n’étant pas une catastrophe, il serait souhaitable qu’à l’avenir les films de Trachtenberg consacrés aux Yautja osent davantage prendre des risques, en espérant qu’il parvienne alors à une véritable proposition artistique.
Le film est toujours disponible en salles
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