Dossier 137: Espoir de réconciliation face à des bavures impunies.
- jacquotnoah100
- 21 nov.
- 2 min de lecture

Cérémonie des César 2023: un film se distingue des autres en raflant 6 récompenses dont meilleur film et meilleure réalisation: La Nuit du 12.
Un thriller hypnotisant de Dominik Moll qui s’inscrit dans la continuité d’une ère plus réaliste de l'œuvre du cinéaste franco-allemand, déjà entamée avec “Seules les Bêtes” en 2019. Nous sommes donc naturellement très curieux de découvrir son nouveau projet: “Dossier 137”, aujourd’hui en salles, hier acclamé à Cannes. Aussi inquiétant que politique (si ce n’est pas déjà un pléonasme), le film centre son sujet sur Stéphanie, enquêtrice de l’IGPN (police des polices), chargée de déterminer les responsabilités d’une affaires de violences policières en plein coeur des mouvements gilets jaunes: Un manifestant touché par un tir de flash-ball. Pleine tête. Séquelles à vie.
“Comment on tient ensemble ?”
Si la mise en scène de Dominik Moll est si discrète, c’est pour mieux laisser apparaître une réalité frontale. Jamais Moll n’oublie que l’histoire qu’il raconte n’est pas de l'ordre d’une résonance avec la réalité mais bien d’un dialogue direct avec celle-ci. Si les gilets jaunes ont été un exemple marquant de violences policières, les récentes vidéos dévoilées lors des manifestations des mégabassines à Sainte-Soline montrent que ces bavures sont loins d’être désuettes.
Parler de son époque est un exercice très difficile, le faire intelligemment encore plus. Pourtant, le cinéaste déroule son récit avec une fluidité remarquable, dévoilant sous nos yeux différents régimes d’images, dans différents formats, sans jamais s’y perdre. Tantôt la fiction est très assumée, et l’on s’autorise même un esthétisme bienvenu, tantôt la caméra s’efface dans un style quasi-documentaire qui ne dissone jamais du reste. L’exercice est d’autant plus épineux qu’il ne faut pas tomber dans un discours manichéen.
Et là encore, Moll réussit son coup. Si le cinéaste dénonce une police gangrenée par une violence systémique, il s’inquiète aussi d’une société irréconciliable: les flics détestent les manifestants. Les manifestants détestent les flics. Stéphanie, très justement interprétée par Léa Drucker, incarne la nuance dans tout ce brouillon dualiste qui peine à faire corps. Un pont chancelant qui relie le fossé toujours plus profond de notre douce démocratie. Anciennement à la brigade des STUPS, elle enquête maintenant sur ses collègues. Elle ne déteste pas la police, mais a perdu foi en son système. Un personnage qui permet à Dominik Moll et son co-scénariste régulier Gilles Marchand d’illustrer un fonctionnement qui entraîne les autorités étatiques dans une toute-puissance sans jamais être condamnées. De fait, enquêter contre la police: la phrase sonne faux; elle l’est. L’image des soi-disant “protecteurs de la république” est trop forte. Au sein des institutions, accuser un flic déplaît; le condamner indigne. Et jamais la punition est à hauteur des actes.
Avec “Dossier 137”, Dominik Moll réussit au travers d’un cinéma singulier à livrer un film aussi juste politiquement qu’il ne l’est dans sa mise en scène et choisit le point de vue idéal pour ne pas sombrer dans l’accusation bête et méchante. Tout ça donne donne envie d’aller crier dans la rue; loin des CRS si possible.
Le film est actuellement en salles
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